En matière de publicité anti-tabac, l'objectif , c'est de marquer les esprits. Alors les publicités vont sans cesse crescendo, au risque toujours assumé de choquer. Après les
sinistres avertissements, les photos chocs, nous voici face à une image volontairement dérangeante. Pour interpeller.
Sauf que cette fois, il me semble qu'on est allé trop loin.
L'image est volontairement provocatrice : un ou une adolescente, car la publicité est déclinée au masculin comme au féminin, est agenouillé face à un homme adulte qui a sa main posée sur sa
tête, dans une posture qui ne laisse pas de place à l'équivoque quant à l'attente de celui-ci...
La manche du bras qui soumet, très clairement affichée comme adulte et masculine, et le visage juvénile du fumeur, dont la majorité est loin d'être évidente sur la photo, en position de
soumission à cet adulte, ne peuvent qu'évoquer, au minimum le viol, au pire la pédophilie.
En tant qu'ancien fumeur, je sais et je me dois de reconnaitre que fumer est une addiction, une soumission, une forme d'esclavage dont il est très difficile de se débarrasser. Mais fusse t-elle
extrêmement forte, cette soumission n'a rien de comparable avec celle que peuvent subir les victimes de crimes sexuels. Et dont j'imagine sans peine le malaise face à cette campagne de
publicité, qui utilise de façon presque cynique leur monstrueux calvaire... Et tout cela me semble d'autant plus condamnable que le message vis à vis de la cigarette est escamoté
derrière la violence de l'image.
Je ne me cache pas derrière mon petit doigt comme Nadine Morano qui estime qu'il s'agit là d'un "outrage public à la pudeur". Parce qu'il ne faut quand même pas exagérer et qu'en matière
d'outrage à la pudeur, le gouvernement n'a pas vraiment de leçons à donner. Non, ce qui me gène dans ces photos, c'est l'ambiguïté du propos, la banalisation de la violence sexuelle, et surtout
l'image déplorable de la sexualité qu'on va ainsi promouvoir auprès de nos jeunes, auxquels est sensée s'adresser cette campagne. Il suffit pourtant d'interroger les jeunes garçons pour être
effaré quant à l'image qu'ils ont de la femme et de la sexualité en général. Et quand je dis cela, je ne parle pas uniquement des jeunes issus de milieux défavorisés... L'accès à
la pornographie, devenu très facile avec Internet, leur fait malheureusement trop souvent confondre les pratiques parfois extrêmes de ce genre de cinéma, avec ce que peut être une vie sexuelle
que je qualifierais de normale ou d'épanouie...
Pour terminer, on remarquera qu'une fois encore, l'Autorité de Régulation de la Publicité, anciennement Bureau de Vérification de la Publlicité, organe interprofessionnel et donc pas
vraiment indépendant, démontre son inefficacité et son laxisme.
Alors, doit-on laisser aux professionnels le soin de s'autocensurer ?
Visiblement pas.